Syrie : troc de guerre ?

(Pour Andrea Cucco)
03/12/24

La nouvelle de la prise d'Alep par ce qu'on appelle les « milices rebelles » a été un choc déchirant de quiconque connaît la Syrie. Il n’y a pas de famille dans ce pays (sans rapport avec les privilèges des corrompus) qui n’ait sacrifié un fils ou un frère depuis le début de la guerre de 2011.

Le coup le plus fort de ces derniers jours n’a pas été la perte de la ville, mais plutôt la retraite de l’armée sans même tirer un seul coup ! Oubliez un instant les chorégraphies pyrotechniques ultérieures destinées à cacher les coulisses : c'est ce qui s'est passé.

Il y a quelques années, pour libérer Alep, des dizaines de milliers de Syriens sont morts, enfants, adultes et personnes âgées, qui sont venus grossir les rangs dans un hachoir à viande.

Le choc ne vient donc pas de l'actualité, c'est-à-dire de la perte de l'une des plus anciennes villes de la planète, mais de la manière dont : ce qui semble être l'issue d'un accord clair.

Entre qui ? Détournons le regard d'Alep... Depuis longtemps, diverses régions comme le Haut-Karabakh (Artsakh), la Syrie ou la Libye (pour ne citer qu'elles), opposent depuis longtemps la Russie et la Turquie. 

Dans le conflit entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan, la Turquie a soutenu le vassal Azerbaïdjan, tandis que la Russie avait une alliance militaire avec l'Arménie : l'Artsakh a finalement été pris en 2024. sans opposition russe par les Azéris.

En Syrie, Moscou (en possession de quelques bases militaires stratégiques) a soutenu le gouvernement de Bachar al-Assad, tandis que la Turquie soutient et alimente les révoltes depuis 2011 : aujourd'hui, le nord du pays est livré aux terroristes « dirigés par les Turcs ». .

Vladimir Poutine et Recep Tayyip Erdoğan, après l'assassinat d'un pilote russe (Un Sukhoi Su-24 de l'armée de l'air russe abattu en 2015), ils sont « tombés amoureux » au fil des années grâce à une relation pragmatique basée sur des intérêts communs.

Citons-en quelques-uns :

  • La Turquie est un client majeur du gaz russe, avec des projets stratégiques tels que le gazoduc TurkStream ; il permet ensuite de contourner les sanctions énergétiques occidentales contre la Fédération de Russie via l’Azerbaïdjan. La Russie est donc un partenaire économique crucial pour la Turquie, avec des accords commerciaux pertinents (y compris les centrales nucléaires).

  • L'achat par la Turquie du système de missiles russe S-400 a marqué un tournant, montrant l'indépendance d'Ankara vis-à-vis de l'OTAN. Diverses sources font en revanche état de livraisons et de transits « équitables » de munitions, d'armes et de ressources vers les deux déploiements en Ukraine par Ankara.

Malgré les divergences « respectueuses » sur les questions stratégiques (nous le répétons : la Turquie serait un pays de l'OTAN), les relations entre les deux dirigeants sont aujourd'hui excellentes. Peut-être excessif.

Le fait que la politique puisse sauver des vies humaines n’est certainement pas pour déplaire. Qu'il puisse dénigrer le sacrifice de la vie d'autrui est quelque chose de différent et, comme le disent les politiciens de Noantri, "inacceptable".

En Libye, la Turquie (aujourd'hui « point de bascule » grâce au drapeau blanc de quelqu'un...) contrôle le gouvernement de Tripoli, tandis que la Russie soutient celui de Benghazi.

Après avoir vendu les Arméniens et les Syriens, les Libyens seront-ils le prochain cadeau de Poutine à Erdogan ? Ou quelqu'un, après avoir nettoyé la maison, va-t-il commencer à cesser d'être utilisé ?

Photo: Kremlin