Je voudrais partager avec les lecteurs de Défense en ligne quelques réflexions suite à l'article publié le 24 novembre par le journal UAE Le National, le principal journal anglophone d'Abu Dhabi. Pour comprendre l'article, vous pouvez le lire en lien suivant, où la nomination annoncée de Luigi Di Maio comme émissaire de l'UE dans le Golfe est vivement critiquée, il faut prendre du recul, fin janvier 2021...
Partant du principe que c'est la prérogative de chaque gouvernement de pouvoir révoquer ou bloquer les licences d'exportation déjà accordées pour du matériel militaire vendu à des pays tiers, le 29 janvier, alors qu'il était ministre des Affaires étrangères, Di Maio a imprudemment publié sur Twitter e Facebook (image suivante) un post où il s'est vanté d'avoir révoqué les licences des Émirats arabes unis et de l'Arabie saoudite impliquant des contrats signés en 2016 et 2017 alléguant que deux pays ne respecteraient pas les droits humains pendant la guerre au Yémen.
Les conséquences immédiates de cette décision ont été la perte de dizaines de millions d'euros pour la société RWM Italia, alors que les Emiratis ont rapidement remplacé l'ancien fournisseur par la société brésilienne AEQ.
Cependant, le plus gros problème est apparu dans les modalités de communication de la révocation aux deux pays qui, au lieu de se faire par les voies officielles réservées, en avaient pris connaissance par le et les sciences sociales.
Il est superflu de souligner la déception, notamment des EAU, suite au léger subi, entraînant l'expulsion de la force opérationnelle italienne de la base aérienne d'Al Minhad et le refus d'autorisation d'atterrir des vols, "d'état" avec le ministre Guerini et "militaire" avec la presse à bord, direction l'Afghanistan en juin 2021.
L'action perverse de Di Maio a entraîné une détérioration des relations officielles entre les deux pays, en particulier dans le secteur de la défense, à leur point le plus bas depuis des décennies.
Compte tenu de ce qui précède, nous pouvons revenir à l'article de Le National.
Quiconque connaît les pays du Golfe sait que les médias sont soumis au contrôle du gouvernement et que toutes les nouvelles d'une certaine importance sont approuvées à l'avance.
Ayant travaillé dans ce domaine pendant plus de 20 ans, en lisant l'article, j'ai immédiatement pensé à la phrase "parlez à la belle-fille parce que la belle-mère comprend".
Les interventions d'analystes prestigieux, comme Cinzia Bianco, que je connais et apprécie depuis un certain temps, soulignent avec des nuances différentes l'incompétence, la faiblesse, le manque de relations dans le Golfe et sa responsabilité d'avoir ruiné les relations avec deux des principaux pays de la région, tout le monde jugeant sa nomination éventuelle comme une grave erreur.
Mais pour un observateur attentif le message que le gouvernement émirat a voulu donner à l'UE et surtout à l'Italie ne doit pas échapper: La nomination de Di Maio n'est pas la bienvenue et sera la pierre tombale des relations entre nos pays.
Le représentant de l'UE aux affaires étrangères, Josep Borrell, aurait choisi Di Maio sur une liste restreinte. Les cursus de certains d'entre eux sont à des années-lumière du modeste bagage culturel, linguistique et d'expérience de l'ancien ministre et on peine à comprendre ce choix. Parce qu'il?
À moins que, comme l'a écrit Bianco, pour des raisons inconnues des simples mortels, l'UE veuille placer Di Maio à tout prix, au lieu de choisir le meilleur candidat pour gérer les relations entre l'UE et les pays du Golfe.
La nomination de Di Maio comme émissaire de l'UE doit être absolument évitée. Si vous voulez vraiment reconstruire la relation effilochée entre l'Italie et les Émirats arabes unis, la première chose à faire est de retirer de la scène politique internationale le responsable de ce qui s'est passé (cela s'est déjà produit en Italie lors des dernières élections).
Le gouvernement italien devrait faire tout son possible pour s'opposer à cette proposition, née au cours des derniers jours du gouvernement Draghi, au niveau européen, mettre en évidence les raisons de notre opposition et revenir pour protéger nos intérêts dans la région.