Trouble de stress post-traumatique dans le passé : preuves historiques et prise en charge dans la Rome antique

(Pour Vasco Monteforte)
17/03/25

Il trouble de stress post-traumatique (SSPT) est désormais reconnu comme un état psychologique résultant d’événements traumatiques, souvent liés à la guerre. Cependant, son existence est documentée depuis des millénaires.

Bien que les civilisations anciennes ne disposaient pas de terminologie médicale spécifique, les sources historiques fournissent des descriptions détaillées des symptômes compatibles avec le SSPT chez les soldats et les survivants d’événements traumatiques.

Les premières descriptions de comportements attribuables au SSPT remontent à la Mésopotamie, dans leÉpopée de Gilgamesh, où le protagoniste vit des cauchemars et de l'angoisse après la mort de son ami Enkidu. Dans l'Iliade d'Homère, Achille manifeste une colère et une mélancolie incontrôlées après la perte de Patrocle, signes d'un fort impact psychologique lié à la guerre.

Les Égyptiens et les Grecs ont également documenté des symptômes d'anxiété et de peurs persistantes chez les vétérans, croyant que ces troubles provenaient de déséquilibres dans les « humeurs » du corps.

Dans la Rome antique, nous trouvons des preuves plus détaillées des effets psychologiques de la guerre à travers les écrits de Tite-Live, Jules César, Sénèque et Tacite. Ces auteurs décrivent des légionnaires qui souffrait d'insomnie, de crises de panique, de cauchemars et de difficultés à se réinsérer dans la société après sa sortie, phénomènes qui relèvent aujourd'hui du diagnostic de TSPT.

Les légions romaines s'engageaient dans des campagnes militaires qui pouvaient durer des décennies, exposant les soldats à une violence constante.

Tite-Live décrit des cas dans lesquels des soldats, après de longues périodes de combat, furent frappés par une terreur soudaine, des tremblements involontaires et des cauchemars récurrents.

Jules César, dans « De bello gallico », mentionne des soldats incapables de tenir les armes à cause du stress, avec les mains moites et une paralysie due à la peur.

Tacite, parlant de la bataille de Teutoburg, raconte que des soldats, même après la fin de la bataille, continuaient à imaginer les clameurs de l'ennemi pendant les heures de la nuit, présentant des symptômes d'hypervigilance et d'hallucinations auditives.

Sénèque, dans ses « Epistulae Morales », aborde le thème de la peur persistante chez les vétérans, soulignant comment la terreur vécue au combat ne les abandonnait pas même une fois qu'ils avaient déposé les armes.

Ces textes démontrent que les Romains reconnaissaient les conséquences de la guerre sur l’esprit des soldats, même s’ils interprétaient le phénomène sous un angle moral ou religieux plutôt que médical.

Bien qu’ils n’aient pas eu de compréhension scientifique du SSPT, les Romains ont développé des stratégies pour atténuer les effets des traumatismes chez les vétérans. L’une des principales solutions était la fraternité militaire, qui offrait un soutien psychologique entre camarades. Tacite décrit ce lien comme essentiel à la survie émotionnelle des soldats.

Une autre méthode consistait à attribuer des terres dans les colonies, afin que les vétérans puissent se réintégrer dans la société. Suétone mentionne comment Auguste a promu ce système pour éviter que les soldats, une fois démobilisés, se retrouvent dans une condition de pauvreté et de chômage, facteurs qui auraient pu aggraver leur état mental.

Les Romains accordaient également un rôle central à la religion, avec des sacrifices et des rites de purification pour libérer les soldats des « miasmes » de la guerre. Les historiens rapportent qu'après les campagnes militaires, les soldats effectuaient des rituels propitiatoires à Mars et à Bellone pour se purifier.

Certains vétérans sont devenus gladiateurs, trouvant dans l’arène un exutoire à la violence refoulée, tandis que d’autres se sont tournés vers le vin et d’autres substances pour apaiser l’anxiété et les souvenirs traumatisants. Pétrone suggère que le vin était considéré comme un réconfort pour les vétérans tourmentés par les souvenirs de la guerre.

Les anciens Romains, bien qu’ils n’aient pas de connaissances scientifiques sur le SSPT, comprenaient ses effets dévastateurs et adoptaient plusieurs stratégies pour les atténuer. Le soutien entre camarades, la réintégration dans les colonies, les rites religieux et l’arène des gladiateurs étaient des tentatives pour faire face au traumatisme de la guerre. Cependant, comme c'est le cas aujourd'hui, tout le monde n'a pas réussi à surmonter la blessures invisibles de la guerre.