1970 - Académie militaire de Modène: silence hors de propos

(Pour Louis Chiavarelli)
13/08/20

Nous venons de rentrer du camp d'été qui a eu lieu dans les montagnes liguriennes. Bronzés, pleins de la santé de vingt ans renforcés par un mois de vie en plein air, excités pour la fin de cette deuxième année de l'Académie qui nous aurait projetés vers l'étoile de l'officier et vers une autre vie, nous espérions moins dur, aux écoles d'application des armes de Turin.

Un soupçon de tristesse a parfois fait surface. Beaucoup de frères de Corso auraient emprunté des chemins différents, un lien profond s'était établi avec les supérieurs et en les saluant, nous avions tous les larmes aux yeux.

Même quitter cet ancien et glorieux palais, plein d'histoire et de traditions, n'a pas été aussi facile que nous l'aurions pensé. Un chapitre fondamental de notre vie se fermait, deux ans qui nous avaient transformés d'étudiants insouciants en soldats.

Il y avait de la satisfaction, du bonheur, de la légèreté. Le chef corse se présenta au commandant de l'Académie pour demander que ce soir-là, le dernier d'Allievi, le Silence soit joué dans le désordre, certain que ce petit écart par rapport aux règlements serait accordé. Ce n'était pas prévu, mais c'était une tradition non écrite que ces notes tristes mais significatives souhaitaient une bonne nuit aux étudiants, avant leur départ définitif de l'Institut.

C'était une tradition profondément ressentie à laquelle nous tenions tous beaucoup. C'était le sceau de deux années très intenses qui avaient profondément changé nos vies. Personne ne s'attendait à ce que le dirigeant corse revienne avec un visage triste et perplexe.

"On n'en parle pas" le commandant avait dit "Le silence dans le désordre est l'affaire de najoni, pas de messieurs officiers comme vous l'êtes maintenant". D'une manière brusque, qui n'était absolument pas en harmonie avec son comportement habituel, il l'avait renvoyé.

Le fait nous a attristés et bon nombre d'entre eux ont nourri des sentiments pas vraiment sereins envers notre commandant. Nous nous sommes sentis trompés par quelque chose qui nous tenait à cœur, que nous pensions avoir gagné avec deux années très dures d'études et de sacrifices.

Évidemment, nous nous sommes décidés, nous étions habitués à autre chose, mais ce soir-là, le dîner n'était pas aussi joyeux qu'il aurait dû l'être, et les rires, chansons et blagues habituels de la dernière nuit à l'Académie ne résonnaient pas dans les dortoirs. Après la confrontation, nous nous sommes couchés silencieusement dans le noir, les yeux grands ouverts, tandis que les pensées et les souvenirs se succédaient dans nos esprits et nos cœurs battaient la chamade.

C'était fini, c'était dur mais nous l'avons fait. Un millier de pensées flottaient dans la tête. Combien de souvenirs, combien de fois avions-nous été sur le point de tout abandonner! Combien de bons et de mauvais moments à retenir, à garder dans le cœur comme des choses sacrées à ne pas perdre au fil des années.

Nous avons attendu le grésillement habituel des enceintes, les décharges et les bruits typiques produits par les opérateurs au plateau tournant qui nous inviteraient bientôt à dormir avec le silence habituel. Mais rien ne s'est passé et les minutes ont passé. Même le silence habituel ne nous a pas été accordé?!

Puis, soudain, une douce mélodie a commencé à se répandre. Au début, nous avons à peine remarqué, mais notre cœur s'est mis à battre rapidement. Mais cela ne venait pas des haut-parleurs mais de la cour. A l'unisson, nous avons couru vers les fenêtres et les avons ouvertes avec fureur. Nous ne pouvions pas y croire. Toute la fanfare du 8e régiment de Bersaglieri, les plumes au vent, nous consacrait les notes poignantes du Silence hors de propos. C'était le cadeau de notre commandant, un cadeau magnifique, inattendu et émouvant. C'était magnifique.

Peu de gens pouvaient retenir les larmes. Un tonnerre d'applaudissements sincères pleuvait des fenêtres bondées des dortoirs sur ces bons Bersaglieri lorsque la dernière note quitta nos cœurs. Criez Viva l'Accademia! Vive les Bersaglieri! Vive le général commandant!

Maintenant, nous pourrions quitter Mamma Accademia avec un cœur serein. Notre commandant nous avait donné la dernière leçon: parfois le cœur passe avant les règlements. Nous ne l'oublierions plus jamais.